O sole mio ! Naples en saveurs… bien plus qu’une pâte à pain

La pizza a pris ici ses racines. Mais Naples vaut bien plus qu’une pâte à pain. Entre ses produits marins et sa pasta, elle décline à l’envi une mosaïque de gourmandises.

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Un golfe de rêve sous un volcan qui sommeille, chargé d’histoire et d’une histoire qui remet loin. Fondée par les Grecs sous le nom de Parthénope, prospère au temps des Romains, tour à tour française, marquée par la dynastie des Anjou, puis espagnole et terre des Bourbons. Mixité des architectures et brassage de pierres. De quoi faire une Naples cosmopolite.

Avec le charme de la Méditerranée, une humeur fredonnant O sole mio et d’autres romances qui fleurent bon l’excès sentimental et les accents braillards. Dans cet amphithéâtre sur la mer se déploie un méli-mélo de faste et de misère, résonne le flux ininterrompu des voitures et des Vespas.

Voilà pour le décor planté.

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A l’intérieur, une terre, ses produits, ses préparations, son «fait maison». Ici plus qu’ailleurs, la pizza a la part belle. C’est sa terre natale, symbolisant la cuisine parthénopéenne. Son origine remonterait du côté d’Horace qui s’en régalait déjà (épicurien oblige) dans ses poèmes lyriques. Plat de pauvre composé d’une pâte à pain cuite au four, assaisonnée simplement d’huile d’olive et de sel, la pizza s’est au fil des siècles dotée de saveurs, au gré des ingrédients, comme la tomate, importée du Nouveau Monde en pleine Renaissance. On la mange alors aussi bien à la maison que dans la rue. En 1889, un ingénieux pizzaïolo napolitain allait lui apportait une autre envergure : en l’honneur de la reine Margherita, épouse d’Umberto I de Savoie, roi d’Italie, il enrichit la préparation traditionnelle de tomate, de mozzarella et de basilic pour en faire une pizza tricolore (aux couleurs de l’Italie donc). Depuis lors, cette fameuse préparation a pris le nom de Margherita. Ainsi va l’anecdote.

Mais la cuisine napolitaine ne s’arrête pas à une simple pâte à pain. Cicciano, Gragnano et Torre Annunziata sont trois bourgades, calées dans le golfe, renommées pour leurs fabriques de pâtes alimentaires artisanales. Agerola, Vico Equense et Castel Volturno peuvent s’enorgueillir de leurs produits laitiers, dont la fameuse mozzarella de bufflonne (la seule et authentique selon les puristes), et la provola fumée. Naples ajoute à sa table ses produits bords de mer, visibles sur les marchés de la via Pignasecca et de la Porta Nolana. Du pittoresque gavé de couleurs, de fragrances en goguette. À vrai dire, ce ne sont pas là des marchés traditionnels, avec leurs rangées d’étals ordonnés, mais des commerçants pignons sur rue, dont les produits frais envahissent nonchalamment les trottoirs. Dans le concert turbulent des harangues marchandes se côtoient le turbot, les calamars, poulpes et seiches, les sardines, les bars, des variétés de daurades et une myriade de coquillages. Autant d’effluves marines qui s’acoquinent joliment, selon les saisons, de tomates goûteuses, d’artichauts, de courgettes, de poivrons, d’aubergines et de brocolis. De quoi réaliser une cuisine franche du collier.

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La table s’ouvre ainsi sur les antipasti : mozzarella alla carrozza (type de pain perdu à la mozzarella), fritures diverses, aubergines grillées, poivrons et courgettes marinés dans l’huile d’olive, mêlées aux câpres et aux anchois. Puis se décline une farandole de pâtes en guise de primi : maccheroni al ragù (pâtes à la sauce tomate et à la viande) ou al forno (au four) ou encore les spaghetti alle vongole (aux palourdes) et alla puttanesca, mijotés avec ce qui reste « sous la main », et les cannelloni alla napoletana associant la ricotta, le jambon et la mozzarella.

En secondi, les polpi alla luciana, petits poulpes à l’ail et à la tomate et la baccalà alla partenopea, de la morue séchée et frite, accompagnée d’une sauce de tomate, de câpres et d’olives noires, sont deux spécialités irrésistibles. On cuisine encore les seiches au vin blanc, taquine les anchois à la tomate, à l’ail et au persil, on régale d’un sartu mêlant le riz au bœuf haché, aux foies de poulet, aux petits pois et à la saucisse.

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Pour finir, la sfogliatella est un aérien feuilleté fourré à la ricotta, parfois aux fruits confits, parfumé de cannelle et de fleur d’oranger. Le choix ne manque donc pas pour toute régalade.

À l’image de ces fameuses friggitorie, lieux de restauration rapide aux coins des rues, typiquement napolitains, proposant mille et un en-cas, tranches de pizza, focaccia et beignets de légumes. Un tourbillon de saveurs qui dit combien Naples est tout entière tournée vers la cuisine.

Jean-Claude Renard

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Infos pratiques Naples. Quelques suggestions d’adresses bon rapport qualité-prix.

Où dormir

Il Convento
Via Speranzella, 137a. Tél. : 081 40 39 77
Une dizaine de chambres très agréables dans le quartier espagnol particulièrement animé. Autour de 100 €

Ausonia
Via Caracciolo, 11 (Mergellina). Tél. : 081 68 22 78
Au creux d’un quartier élégant de Naples, proche de l’embarcadère pour les îles, cet hôtel propose une vingtaine de chambres (entre 90 et 120 €), au décor foncièrement marin.

Parteno
Lungomare Partenope, 1. Tél. : 081 24 52 095
Un charmant bed and breakfast le long de la promenade en bord de mer (il Lungomare), et au premier étage d’un bâtiment cossu (autour de 100 €).

Carafa Di Maddaloni
Via Maddaloni, 6. Tél. : 081 551 36 91
B&B Carafa

Un bed and breakfast surprenant et charmant au ler étage d’une demeure historique de Spaccanapoli, dans un environnement musical.

Locations

Site de locappart Italie,
75 rue de la Fontaine au Roi, 75011 Paris. Tél. : 01 45 27 56 41.
Une agence solide qui propose des appartements à louer dans le centre historique. Excellent rapport qualité prix (à partir de 80 € pour 2 ou 4 personnes, 130 € au-dessus).

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Antica Pizzeria da Michele
Via Cesare Sersale,1/3. Ouvert tlj sf dim. 10h-23h.Tél : 081 5539204. 5 à 10 €
Le temple de la pizza affiche seulement trois choix à sa carte. Du régal à petit prix.

Taverna del’ Buongustaio
Via Basilio Puoti n. 8. Tél. : 081 5512626. Ouvert tlj sf dim. soir. 15 à 20 €
Petite trattoria pour une goûteuse cuisine napolitaine.

Antica Trattoria Da Carmine
Via dei Tribunali, 330. Ouvert tlj au déjeuner seulement. Tél. 081 29 43 83. Entre 15 et 22€
Dans le centre historique, une trattoria sans prétention mais gavée de parfums. Plats de pâtes à foison.

Antica Trattoria Don Peppino
Vico Gravina 7/10. Ouvert tlj sf dim. Tél. 081 551 28 54. Autour de 18 €
Une ambiance chaleureuse et une cuisine sans fioritures. La carte est limitée à une vingtaine de spécialités (risotto, linguine et penne).

Cantina della Sapienza
Via della Sapienza, 40, ouvert tlj sf dim. Tél. 081 45 90 78. Autour de 20 €
La maison s’est fait une réputation pour son gratin d’aubergine aux tomates et au parmesan. Et ce n’est pas le seul intérêt. La pizza bianca est aussi délicieuse.

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Scaturchio et L.U.I.S.E.
Piazza San Domenico, Spaccanapoli

Les Napolitains sont très amateurs de ‘dolci’. Parmi les gourmandises, le fameux babà, les sfogliatelle, la pastiera, les struffoli et rococo’ à l’époque de Noël.

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Marchés

Pignasecca
Via Pignasecca et alentours. Du lundi au samedi, 8h-13h.

Porta Nolana
Via Porta Nolana. 8h-18h

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Jean-Claude Renard
Jean-Claude Renard, journaliste à Politis et auteur, amateur passionné de gastronomie, a notamment écrit : avec Michel Portos, "Michel Portos. Le Saint-James en 65 recettes", (Flammarion, 2011) ; avec Yves Camdeborde, "Simplement bistrot" (Michel Lafon, 2008) ; avec Emmanuelle Maisonneuve, "Mots de cuisine" (Buchet-Chastel, 2005) ; "La Grande Casserole" (Fayard, 2002). "Arrière-cuisine" est paru aux éditions de la Découverte en 2014. Il a également publié "Marcello" (Fayard, 2002), "Céline, les livres de la mère" (Buchet Chastel, 2004), "Italie. Histoire, société, culture" (La Découverte, 2012), avec Olivier Doubre et "Si je sors je me perds" (éditions L'Iconoclaste, janvier 2018). Nous avons appris avec grande tristesse le décès de Jean-Claude, survenu le 31 octobre 2022 (https://www.politis.fr/articles/2022/11/en-memoire-de-jean-claude-renard-journaliste-a-politis-44997)