Henri Calet, L’Italie à la paresseuse

Voilà un petit livre décalé, d’un humour libérateur, divertissant, et, malgré son parfum légèrement suranné, toujours actuel. Il s’agit de la réédition d’un «Journal de voyage» écrit en 1949 ( Le Dilettante, 2009, 192 p., 17€).

« Le voyage en Italie est un genre littéraire. Il nous a valu, de Montaigne à Larbaud, quelques jolies méditations sur les arts, les transports et la gastronomie. C’est conscient de cette tradition qu’Henri Calet effectue le sien ».


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Le narrateur est un journaliste parisien (comme l’auteur) invité à Padoue pour y rendre compte d’un congrès international sur le « gaz combustible ». Il aimerait en profiter pour découvrir les hauts lieux touristiques de l’Italie que lui ont vantés avec tant d’emphase les célèbres grands voyageurs du passé (De Brosses, Mme de Staël, le guide Baaedeker, le Larousse…). Pourtant, il en sera empêché par une accumulation récurrente de déconvenues peu banales: ou bien il s’endort dans le train, ou bien il fait nuit, ou bien il manque de temps.

Notre narrateur ne voit donc rien, ou si peu, de Venise, de Padoue, de Rome, et nous non plus ne verrons rien de l’Italie, ou si peu. Il voyage assailli par la somme incroyable de clichés et d’idées reçues sur ce pays, qui perdurent dans nos têtes, et les circonstances souvent cocasses de ses déplacements l’empêchent de confirmer les lieux communs les plus ressassés. Il est au regret de ne pouvoir nous livrer « une Rome toute mâchée » et c’est tant mieux pour nous, qui y gagnons en humour.

Cette petite escapade transalpine lui apprendra à ses dépens que « Ce qui rend les voyages à peu près inutiles, c’est que l’on se déplace toujours avec soi, avec les mêmes pensées, les mêmes ennuis, le même tour d’esprit, les mêmes appréciations sur les choses et les gens ».

L’auteur s’est visiblement amusé et nous rions de bon cœur, mais les anecdotes sont parfois moins anodines qu’il n’y paraît – en particulier les brèves réminiscences historiques concernant d’Annunzio, Mussolini, Ciano (…) – puisqu’elles permettent, somme toute, de remettre en question nombre des préjugés.

La Presse :

Avec Calet, l’aventure est souvent intérieure, et le voyage très subjectif.
Émilie Grangeray, Le Monde des livres, 9 juillet 2009

image002bis.jpgCe récit aurait pu s’intituler « L’Italie la nuit », tant c’est sous cet éclairage qu’il tâte de l’âme transalpine, entre trains couchette, courses de lévriers ou maisons closes. Voici comment d’un voyage plutôt raté, on fait un beau morceau de littérature. Jeanne de Ménibus, Femmes, juillet-août 2009

Il est l’écrivain faussement candide et allègrement modeste des ratages magnifiques.
La Vie, 18-24 juin 2009

Mine de rien, le myope et grand Calet (…) est le céramiste des cœurs fêlés, le délicat qui goûte, déguste et ne s’empiffre jamais. Son Italie fleure la Dolce Vita, mais à travers des petites choses parsemant notre minestrone de mille saveurs subtiles.
François Cérésa, Service Littéraire, juin 2009

Ce n’est pas un touriste qui se raconte mais un observateur des petits faits quotidiens. Calet voyage à hauteur d’homme et c’est ce qui fait le charme de sa relation.
Vosges matin, 27 mai 2009

Le lecteur est ravi, une fois encore, d’être le compagnon de route de cet écrivain faussement naïf et vraiment mélancolique, drôle à force d’être désolé, à la démarche compassée, qui n’a pas l’énergie de gratter la croûte artistique dont l’Italie est revêtue.
Jérôme Garcin, Le Nouvel Observateur, 28 mai – 3 juin 2009

Note de l’éditeur (2e de couverture) :

3.1247209882.pantheon-rome.jpgLe voyage en Italie est un genre littéraire. Il nous a valu, de Montaigne à Larbaud, quelques jolies méditations sur les arts, les transports et la gastronomie.

C’est conscient de cette tradition qu’Henri Calet, en 1949, effectue le sien.

Il enfile bien la Botte, ville après ville, mais, dès qu’approche l’instant élu des friandises culturelles, Calet fait mine de rien, regarde ailleurs, s’absente. Car il vise l’Italie « au-dessous de la peinture », se refusant à la voie royale des sites et des musées, à son cortège de béatitudes convenues. Mais que surviennent une suite de « petits faits vrais », maints détails savoureux, un rêve possible, alors Calet consent, sa fringale s’éveille et sa phrase pétille. Enthousiasme momentané.

Le seul vrai voyage serait de s’oublier un temps. Mais on se colle à la peau.

Que ce soit pour Venise ou pour les Buttes-Chaumont, on ne part pas .Telle est la leçon.

Publié sur Altritaliani le 7 octobre 2009 – Mise à jour en janvier 2012

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